En montant dans le bus

Aujourd’hui en montant dans le bus, j’ai croisé une jeune étudiante Béninoise que j’avais aidée il y a quelques mois. Pour rester en France il fallait quelle trouve du travail et j’avais servi d’intermédiaire avec une entreprise.

J’avais fait sa connaissance sur internet et nous avions passé un peu de temps ensemble. Elle habite la même ville que moi, ce qui est quand même pratique quand on sait que je ne m’en éloigne pas à cause de mes angoisses.

Elle avait l’air en forme, souriante. Ça m’avait un peu agacé qu’elle ne trouve pas d’emploi, vu le travail qu’elle avait dû fournir pour réussir des études difficiles, loin de sa famille…

 

Schizophrène, pourquoi tant de haine ?

C’est la honte d’être schizophrène, même avec mes parents ce mot est tabou. Mes amis qui ne sont pas au courant imaginent que je suis juste quelqu’un d’angoissé. Ils me disent que je devrais me bouger pour sortir un peu plus et trouver du travail.

Avant que cette maladie ne se déclare j’étais toujours prêt à sortir, faire la fête, rencontrer du monde. J’étais un jeune homme plein de vie.
Aujourd’hui, après deux crises de schizophrénie aigues depuis que j’ai 20 ans, je suis un homme à terre. J’aimerai être compris d’avantage. J’ai mis plusieurs années à accepter cette maladie et je ne peux en parler. C’est très frustrant.

Je souffre et quand quelqu’un me demande si ça va, je suis obligé de serrer les dents et de répondre oui.

J’ai 35 ans et si je fais le bilan de ma vie, je n’ai pas d’enfant, pas de situation professionnelle et j’ai dû passer le plus claire de mon temps dans mon canapé à m’abrutir de télévision.

Quand je souffre trop, je m’allonge dans mon lit et j’avale des comprimés pour dormir, pour quelques heures de répit.

Quand je sors de chez moi et que je croise une connaissance, j’ai envie de partir en courant. Je dois quand même dire bonjour, parler, écouter et sourire. Ça me pèse vraiment.

Toute communication est une souffrance, en plus si c’est pour écouter les gens qui se plaignent. J’ai envie de leur dire « aller vous faire foutre ».

Lisa

Hier j’ai discuté avec une vieille amie au téléphone, elle s’appelle Lisa. Une jeune femme assez au fait des problématiques de souffrance psychique. Il parait que dans les ESAT (établissements et services d’aide par le travail) ils sont à la recherche de personnes en souffrance psychique.
En y réfléchissant pourquoi pas ?

Je suis reconnu travail handicapé donc j’ai toute ma place dans ce genre d’établissement. Il resterait juste à voir si j’en serais capable même pour une mi-temps et ça c’est moins sûr.

J’ai quelques craintes sur mon aptitude à intégrer un groupe avec des contraintes de production et une hiérarchie, à voir….

Lisa est une jeune femme assez jolie et comme à chaque fois, elle me dit que j’ai une capacité d’écoute impressionnante. Ce sont ses propres termes.

Une fois il faudra que je lui dise que les femmes me disent souvent cela. Elles aiment discuter avec moi mais ce n’est pas pour autant qu’elles m’imaginent autrement que comme un ami. Ça peut être frustrant. J’ai sans doute plus une difficulté à parler de moi, à spontanément expliciter le fond de mes pensées, donc je suis toujours d’accord avec elles et à leur écoute.

Le reste de l’après-midi j’ai rêvassé en pensant à cet appel téléphonique et au doux visage de Lisa.

Rendez-vous dans un pub avec une femme rencontrée sur internet

L’honnêteté est la base de toute relation homme-femme. Mais dire à une femme que l’on souhaite séduire que l’on est schizophrène, autant se tirer une balle dans le pied. Alors, cacher sa maladie c’est déjà mieux.

Elle me demande pour commencer : « tu fais quoi dans la vie »
Je lui réponds alors que ce n’est pas vrai : « je cherche du travail »
Elle ajoute : « dans quel secteur »
Me sentant piégé, je lui avoue qu’en fait des problèmes de santé m’empêchent de travailler.
Elle insiste : « On ne dirai pas pourtant, tu n’es pas en fauteuil roulant »
Je ne sais pas quoi répondre mais je lui dis : « oui, j’ai des angoisses quelques fois »
Elle commence à se méfier et m’annonce : « je recherche quelqu’un d’honnête, bien souvent les hommes sont des menteurs »
Elle rajoute : « j’adore voyager, pas toi ? »
Je suis un peu embêté, elle va se sauver mais je le dis quand même : « j’ai des angoisses si je m’éloigne à plus de 5 km de chez moi »
Elle est prise de pitié et me dit : « cela doit être dur à vivre »
Elle rigole et me demande : « tu veux des enfants ?»
J’ai déjà du mal à m’occuper de moi alors gérer des enfants. Je commence à me sentir mal à l’aise. Elle regarde à droite et à gauche et reconnait un homme assis quelques mètres plus loin. Elle me demande la permission d’aller lui dire bonjour.

Je me retrouve seul, le barman veut que je règle la note. Les minutes passent et elle ne revient pas. Je rentre chez moi et ce soir je ne me coucherai pas tard.

La police

Depuis quelque temps, je n’arrive plus à prendre le bus pour aller en ville. Ça a commencé par des angoisses en me regardant dans la glace le matin.
Je me motive pour aller quand même à l’arrêt. Mon cœur se met à battre plus vite et j’ai la tête que tourne.

Je rentre dans le bus en me demandant si je ne vais pas « y mourir ». Le trajet dure vingt minutes pendant lesquelles j’ai des montés d’angoisse. Je prends alors de grandes respirations. Les gens à côté de moi me stressent, j’ai l’impression d’être sur une autre planète.

Le bus est arrêté par une voiture de police. Ils font un contrôle pour voir si tout le monde a mis sa ceinture de sécurité.

Pas de chance pour moi dans j’étais distrait et la maréchaussée vient vers moi. J’essaie de leur parler normalement mais mon angoisse monte. Je tiens des propos incohérents. Ils m’embarquent et m’envoient directement aux urgences. Ils pensaient que j’avais pris de la drogue.

Je me retrouve en unité psychiatrique après que le médecin ait diagnostiqué que je délirai.

J’ai passé une semaine à l’hôpital avec uniquement les affaires que j’avais sur moi. Depuis plusieurs années, voté sous le gouvernement Sarkozy, il faut l’avis de deux médecins et d’un juge pour sortir.

Je n’ai jamais mis la vie de personne en danger, même dans mes crises aigues. Bien sûr je suis diffèrent mais dans cette société nous n’avons plus de place.

Pourquoi faire la manche sur internet ?

C’est une façon non agressive qui laisse de choix à chacun, en conscience, de façon à respecter la loi.

Je me suis déjà installé à un feu rouge pour mendier mais le regard des autres était insupportable. Au bout d’un moment, pris de crises d’angoisse j’ai dû stopper mon activité.

Mes soucis financiers ne me laissent pas d’autre choix, dettes…

Sur internet je suis protégé des agressions et des raquetteurs. Je ne pollue pas l’espace publique et je ne bloque pas la circulation. Je ne suis pas angoissé et je peux « travailler » tranquillement.

Cela fait depuis juillet 2012 que je poste régulièrement des articles me concernant dans le cas où vous voudriez en savoir plus sur moi, mes souffrances, mon handicap.

Vous pouvez toujours me contacter sur mon blog si vous voulez des renseignements supplémentaires.




Schizophrénie et relation amoureuse

Je suis dans mon canapé et je suis angoissé. J’ai du réduire ma dose de neuroleptique, c’était intenable. Les effets secondaires, une tension dans tout le corps m’en ont contraint. Aujourd’hui je peux écouter de la musique et me détendre un peu mais tout m’effraie.

Entre les deux, je préfère quand même la peur. Une peur diffuse qui coule tout doucement dans les veines. Je suis seul chez moi. Le monde autour n’existe plus vraiment. Je vais fermer les volets. J’ai envie de parler à quelqu’un, de me rassurer avec la voix d’un ami mais les amis se lassent vites.

Alors pourquoi ne pas écrire ?

C’est un peu comme jeter une bouteille à la mer. On ne sait pas qui va la lire. Je suis sur une île déserte mais même avec toute la volonté du monde vous ne pourriez pas faire grand-chose pour moi.

Je suis là à coté de vous. Je pourrais tenir votre main mais l’univers dans lequel je suis est tellement loin du votre.

Je suis comme vous, un être humain qui cherche une lumière dans cette nuit sans étoiles. De temps en temps les phares d’une voiture passent à travers ma fenêtre. Surement un père ou une mère de famille qui rentrent retrouver les leurs.

 

Je ne supporte plus rien

Je ne supporte plus les bruits, les sons, ni le silence. Je ne supporte plus les gens. Je ne me supporte plus. Les sentiments, l’amour, la haine, la jalousie, la colère me sont insupportables.

La nuit dernière j’ai rêvé que je me faisais lyncher. Il n’y a pas de lieu sur terre ou je me sente bien. J’emporte partout avec moi cette souffrance.

J’ai cru qu’en haut d’une montagne, dans une église ou une mosquée mais rien n’y fait. J’ai imaginé que l’alcool ou le shit mais c’est pire.

Nous ne contrôlons pas l’amour ni la haine que l’on peut susciter. Ça arrive sans que l’on n’y prenne garde.

Je me suis fait le plus petit possible, j’ai essayé d’être insignifiant mais le naturel revient au galop, inévitablement.

Je me suis éloigner des autres, j’ai tout essayé mais l’amour et la haine étaient toujours là, sans que je ne puisse les gérer.

Aujourd’hui je suis fatigué. J’ai envie de sortir le drapeau blanc mais il n’y a pas de reddition possible. Il faut aller jusqu’au bout.

Chaque jour je deviens plus faible, plus associable, plus malade mais la haine et l’amour sont toujours là et grandissent à mon égard.

Je voulais m’en éloigner et j’ai peur d’avoir fait tout le contraire. Je suis allé là où je ne voulais surtout pas être.

Certains diront que c’est le destin qui nous emmène et que l’on ne peut rien y faire. Je commence à y croire.

Je ne sais pas comment ni quand tout cela va finir mais je sais maintenant que c’était comme ça que cela devait se passer. Je n’ai rien décidé.

Une journée tristement ordinaire

Une journée ordinaire
Une journée ordinaire

Cet après-midi je suis sorti et j’ai pris le bus pour aller en ville. Fortement angoissé à l’aller, je suis arrivé à bon port quand même.

En même temps on ne peut pas demander au chauffeur de faire demi-tour. C’est pour ça que c’est angoissant.

Dans le bus il faut bien croiser le regard des gens mais le plus déroutant c’est quand je me mets à entendre des mots par-ci et par-là et que je leur fais raconter une histoire me concernant. Comme si les gens autour de moi connaissaient mes secrets les plus inavouables et en parlaient de manière détournés. C’est une journée ordinaire pour moi.

Je vous l’accorde c’est du pur délire, je suis paranoïaque. Dans ces moments-là j’écoute mon mp3, j’ai l’impression de devenir fou sinon.

C’est un peu ça qui m’empêche de me sentir à l’aise dehors. Je me refugie dans mon appartement. Le présentateur à la télévision parle de moi aussi, de manière détourner. Heureusement, je peux éteindre.

Je ne sais pas pourquoi je fais tout tourner autour de ma personne. Peut-être parce que je me prends pour dieu.

Je suis dans une situation compliquée.

Pour en revenir à ma sortie en ville, le retour en bus était plus rassurant. En me rapprochant de mon logement, je me sens de mieux en mieux.

Il m’arrive de rêver que je gagne à l’euro million comme il m’arrive de rêver que la schizophrénie sera guérie de mon vivant et que je pourrais profiter un peu de la vie quand même. Je voudrais tant vivre une journée sans schizophrénie.

Pouvoir vivre et ressentir, pour les mauvaises et bonnes nouvelles. C’est dur de faire semblant d’être ému ou joyeux lorsqu’on ne ressent rien. Je le fais pour ne pas que les gens me trouvent étranges, si j’esquisse un petit sourire lorsque j’apprends un décès. Je fais aussi semblant de rire.

Je viens de prendre mon traitement

J’étais dans un joyeux délire, pleins d’idées positives et je voyais le futur radieux quand j’ai pris ces fameuses pilules… Mais mon tripe c’est arrêté au bout d’une heure. C’est le temps qu’il faut au neuroleptique pour faire son effet.

Je me sens frustré, triste, en panne de volonté…. Je n’ai même plus faim malgré l’heure. C’est surement mieux pour la société puisque c’est « elle » sous la contrainte qui me l’impose. Depuis les dernières lois, même en ambulatoire on peut vous obliger à prendre votre traitement.

L’infirmière vérifie bien à chaque fois que j’avale tout et que je ne fais pas semblant.

C’est un peu humiliant mais c’est une décision du juge. Je n’ai jamais rien fait de dangereux pour moi ou pour les autres mais voilà, les lois Sarkozy.

C’est surement mieux pour moi vous devez penser ?

Mais qui cela peut bien gêner que je délire ?

Je ne supporte plus votre monde merde quand je regarde la télévision. Hier j’ai vu des femmes à moitiés à poils jouer au football américain. Il parait que c’est pour le spectacle et que ça arrive en France. J’avoue que j’ai été choqué.

Je préfère ma douce folie qui ne fait de mal à personne à votre soif de pouvoir, d’argent, de sexe….

Mais là je n’ai même plus envie de me révolter, les cachets font leur œuvre. J’essuie la bave qui coule sur le coin de ma joue et j’allume TF1.