Les supers pouvoirs d’un schizophrène

Magicien

J’ai cru avoir des supers pouvoirs. Notamment, interpréter les gestes ou le discours des gens qui parlaient autour de moi. Même s’ils ne me connaissaient pas, ils s’adressaient à moi. Dans un bus, ça peut-être euphorisant ou carrément angoissant. Je pouvais communiquer avec eux sans leur parler directement.

Il n’y a qu’en haut d’une montagne ou l’on peut se réfugier. C’est là où j’ai fait ma première crise. C’est pesant de tout ramener à soi. Surtout quand les sujets des interprétations font mal.

On ne sait plus où aller pour être tranquille. Aucun lieu sur terre n’est reposant et on finit par devenir complètement paranoïa, jusqu’au point d’exploser, ça peut mettre des années.

J’avais vraiment l’impression que tous les gens que je croisais dans la rue étaient au courant de ce que j’avais dans la tête, mes pensées, mes secrets…

Ma deuxième crise je l’ai fait dans un chantier de fouille archéologique avec toujours le même mécanisme maléfique. Je voulais peut être faire ma psychanalyse avec des gens qui creusent et qui cherchent des vestiges du passés.

J’ai beaucoup apprît sur l’extrême souffrance que l’on peut ressentir. J’ai mis des années à revenir sur les lieux de mes crises.

Leur simple évocation me rendait malade. Je crois qu’avec ces crises, je suis allé jusqu’au fond de moi. J’ai découvert la douleur et la folie la plus terrible.

A cette époque, je ne prenais pas de médicaments. Je peux grandement remercier la science même si rien n’est parfait pour l’instant. Il y a toujours des effets secondaires désagréables.

Aujourd’hui, je ne peux plus voir quelqu’un souffrir, je suis un peu traumatisé. Je ne supporte pas la violence qui entraine la souffrance.

Je n’arrive plus à regarder les bêtisiers, à la télévision, dans lequel les gens se cassent la gueule.

Demander la lune

demander la lune

J’ai envie de tout casser ce matin, comme un fumeur en manque de nicotine. Il y a du soleil qui passe à travers la fenêtre de mon salon, je le remarque à peine. La pression monte comme si je n’avais pas eu ma dose de crack. Tous les détails qui me prennent la tête d’habitude n’ont plus vraiment d’importances.

J’aime bien cette sensation, je suis à l’exact opposé de l’angoisse, c’est comme une catharsis. Sûr de moi, je n’ai plus peur d’affronter tout ce qui me bloque d’habitude.

Il faudrait que je retrouve le mécanisme qui m’a permis d’en arriver là. Ça fait du bien de ne plus être fébrile. Si je pouvais être tout le temps dans cet état.

J’écoute un peu de musique. Ils passent « Jenn Ayache – L’Américain » à la radio, je me laisse bercer par la mélodie.

Malheureusement, je sais que la chanson va s’arrêter et que je vais retrouver mes angoisses, mes troubles obsessionnels compulsifs…

Et puis le Solian que je viens de prendre va faire son effet et émousser mes émotions, me plonger dans une torpeur chimique. Ce sont les effets négatifs de ce type de médicament. Etre un zombi ou un fou, il faut faire son choix. C’est un peu exagéré mais c’est le principe.

Avec ce traitement, je pourrais, sauter à l’élastique du haut d’un pont, je crois que je ne ressentirais pas grand-chose.

Je commence à être un peu fatigué. Mon état d’euphorie n’aura pas duré longtemps. Je vais retourner dans mon canapé, regarder la télévision et vivre à travers elle. Je suis mécontent. Je demanderai à mon psychiatre s’il n’existe pas une molécule qui pourrait laisser vivre ce que je ressens et garder mon esprit libre des délires et des angoisses. C’est un peu demander la lune mais les hommes y sont bien allés.

L’équilibriste schizophrène

équilibriste schizophrène

Pas envie de sortir aujourd’hui, il pleut et je ne veux pas voir de monde mais je n’ai plus de pantalons à me mettre. Il faut que j’aille chez « jules » acheter une paire de jeans.

Je me motive !!!

Une fois arrivé, j’ai passé une demi-heure à trouver la bonne taille et le bon model. J’ai un peu grossi je crois.
Pas d’angoisses dans les cabines d’essayage, c’est un bon point. Une vendeuse assez sympathique m’a donnée un coup de main, pour le choix, entre les jeans slim, straight et regular.
J’ai 36 ans et je ne me voyais pas mettre un jean slim.
Au bout d’un moment, il faillait que cela s’arrête. Je n’aime pas trop les magasins. Je me sens sous pression.

Direction la grande surface. J’avais deux trois bricoles à acheter. Je profite de ces jours ou je vais plus ou moins bien pour sortir.
Je ne regarde pas les gens dans les yeux dans les allées, je préfère qu’on ne me remarque pas. Une fois les produits achetés, directions les caisses automatiques. Il n’y a jamais personnes et cela m’évite l’angoisse des files d’attente aux caisses classiques.
C’est toujours une aventure pour quitter mon appartement. J’essaie de me fondre dans la masse, d’être comme les autres. J’ai souvent l’impression d’être un équilibriste et de pouvoir tomber à chaque instant. De me faire remarquer et de ne pouvoir gérer, d’avoir des propos saugrenus. Je fais attention à ce que je dis, à mes gestes…
Au début, j’avais toujours une angoisse lorsque je voyais passer un camion de pompier. Je ne pouvais m’empêcher de penser qu’ils venaient pour m’hospitaliser sous la contrainte. Ce qui me parait normal ne l’est peut-être pas pour les autres et comme je ne m’en rends pas compte. Petit à petit, il faut reprendre confiance en soi.

Je serai une rock star

je suis une rock star

Ce matin j’ai réussi à prendre le bus, je n’ai pas eu d’angoisses. J’ai été dans une association pour personnes en souffrance psychique. J’ai parlé avec deux trois adhérents. Ca ma soulé, je suis rentré assez vite chez moi. Je n’ai pas eu envie d’écouter les problèmes des autres, j’en ai déjà bien assez avec les miens.

Je n’ai pas le moral. D’habitude c’est sympa d’échanger sur nos difficultés mais ce matin j’ai juste envie de rien. Je me sens mal. J’ai eu 36 ans, il n’y a pas longtemps. Peut-être la crise de la quarantaine qui arrive un peu en avance. Ou alors, rien ne se passe jamais comme je le souhaite. On est nombreux à vouloir tutoyer les étoiles. Au final, les années passent et si j’arrive à finir ma vie sans retourner en hôpital psychiatrique, ce sera déjà pas mal.

Vivre comme une rock star,  avec des femmes après chaque concert et être interviewé par Ardisson. Au final, il va falloir que je me donne un bon coup de pied pour aller faire quelques courses, pour manger un peu aujourd’hui.

Je maigris à vue d’œil.  Chacun ses contraintes et nombreux sont ceux qui ont une vie rangée. Ma maladie m’empêche de gérer des enfants… Je m’en serai contenté.

Ma maladie m’empêche de passer le permis de conduire et de travailler, je m’en serai contenté.

Alors moins on en a et plus on rêve. Comme utopie, vivre comme une rock star, c’est pas mal.

Cependant, aujourd’hui, je souhaiterai juste me sentir bien. Etre heureux de discuter avec mon voisin,  heureux de voir la mer, le soleil se lever ou d’écouter le bruit des feuilles d’un arbre qui m’a vu naître.

Dans mon cerveau, il y a quelqu’un qui n’est jamais content. Faudra que je lui dise, de se calmer un peu et de me laisser profiter et d’arrêter de voir le monde à travers les publicités à la télévision.

Le 8 mai

Flag of european union

Je suis fatigué, dans mon cerveau les idées tournent. Je souhaiterais que me calmer un peu, me poser psychologiquement.

Ce matin, j’ai été courir une heure, avant qu’il ne pleuve. Ça m’a fait du bien. Depuis que je me suis mis à la cigarette électronique, il y a un an, mes performances sportives sont biens meilleures.

Après, repas en famille, c’est toujours un peu compliqué chez mes parents, je suis stressé. Depuis peu, je me suis rapproché de ma mère. J’arrive à lui dire des mots affectueux.

Cet après-midi, je suis dans mon appartement. A la télévision passent certains programmes qui vraiment, abrutissent les gens.

Je tourne en rond sans pouvoir me calmer tout en n’ayant rien envie de faire. Je sens la pression monter.

Un jour mon psychiatre m’avait dit, si vous êtes sur le point d’exploser, prenez une plaquette de Temesta. Heureusement je n’en suis pas encore là.

Juste en dessus, j’ai remis le lien de deux nouvelles que j’avais écrites en 2012, qui sont disponibles sur Amazon.

Mon oncle médecin qui les avait lues, les avait appréciées. Ce n’est pas le genre de bonhomme à faire des compliments parce que je suis de sa famille. Au contraire, comme certains médecins, il a appris à se faire une carapace pour se protéger de la souffrance des gens. Il la côtoie tous les jours dans son travail.

Aujourd’hui nous sommes le 8 mai. J’ai une petite pensée pour la paix en Europe et l’entente entres les peuples. Que cela dure le plus longtemps possible. Nous sommes des privilégies par rapport à certains peuples dans le monde qui souffrent beaucoup plus.

Je m’imagine en Syrie, sans traitement, à errer entres les ruines d’un pays, qui est bien plus fou que la plupart de mes délires. Je suis contre la violence, même sans médicaments.

Déprime du matin

déprime
déprime

Levé à 7h00, j’ouvre les volets. Je suis fatigué psychologiquement. Je réfléchis un peu et je ne vois rien dans la journée qui s’annonce de passionnant. Comme tous les matins je fume ma seule cigarette de la journée puis j’allume la télévision.

Les chaines d’informations en continu titrent sur ces  deux cents malheureuses adolescentes qui ont été enlevées au Nigeria. J’avais été révolté par leur sort et je suis soulagé de voir que nos dirigeants et certains artistes commencent à se préoccuper d’elles.

En pensant à ces filles je me dis qu’on vit vraiment dans un monde atroce. Déjà que je n’étais pas franchement joyeux, tout cela ne remonte pas mon moral.

Dehors le ciel est gris. Je suis lasse. J’ai besoin de soleil et d’une plage de sable fin. Je ne suis pas parti en vacances depuis plusieurs années. J’ai des angoisses lorsque je m’éloigne à plus de 15 km de mon appartement et comme je n’habite pas près du littoral…

Je crois que je fais une petite déprime. Ce matin, je n’arriverai pas à prendre le bus pour aller en ville. Je dois m’y rendre pour un rendez-vous pour l’association dans laquelle j’ai pris quelques responsabilités.

Je vais devoir demander de l’aide à mes parents pour aller me conduire. En zappant à la télévision, je cherche sur les chaines musicales, un air ou un refrain qui pourrait me redonner un peu la pêche. Rien n’y fait ce matin, je n’ai aucune motivation et l’impression d’avoir un casque sur la tête. Même mon corps n’est pas content ce matin, il est tendu et me fait souffrir.

Pourtant aujourd’hui, il va falloir quand même sourire et parler pour donner le change. J’ai en horreur les réflexions des gens qui me disent que je n’ai pas l’air d’aller bien. Demain sera un autre jour et j’espère qu’il sera meilleur, sans déprime.

Au bord de l’explosion

s'arracher les cheveux

Cet après-midi, je me suis fait un peu mal à la tête, sur mon ordinateur. Je suis resté trop longtemps devant l’écran. En même temps cela me passionne. J’ai des angoisses, je ne sais plus trop ou j’en suis. Je viens de prendre mon traitement et j’espère que cela fera effet. Il faudrait que je dise à mon cerveau d’arrêter de tourner. Je ne suis pas apaisé. Heureusement je suis chez moi. Je peux donc essayer de me calmer sans que personne ne vienne m’importuner. J’ai besoin de calme. Je n’ai pourtant rien fait d’extraordinaire, juste quelques modifications sur mon blog.

Une femme a appelée pour du démarchage téléphonique. D’habitude je discute un peu pour être poli mais là j’ai été assez direct, je n’en pouvais plus. Elle fait un métier difficile.

J’ai une bière dans mon réfrigérateur mais je ne suis même pas tenté. Ça ne ferait qu’aggraver mon état, déjà limite.

Il n’y a pas vraiment de recette miracle quand je suis prêt à exploser. Juste prendre un peu de recul, boire un peu d’eau, écouter de la musique et essayer de me concentrer dessus.

Surtout ne voir personne et rester calme.

Prison à domicile

barreau-de-prison

Ce matin je dois prendre le bus pour aller en ville, je suis angoissé. Ça a commencé en me regardant dans la glace, en me brossant les dents. J’anticipe une crise d’angoisse dans le bus avec les passagers qui me regardent, ma tête qui tourne… C’est insupportable et dans ces cas-là, plus je m’éloigne de chez moi et plus l’angoisse monte.

Je n’ai pas non plus envie de me gaver de médicaments. Certains jours, j’arrive à prendre les transports en commun mais c’est de plus en plus compliqué. Le regard des gens, les lieux clos, tout cela me fait peur.

Dans un bus il n’y a pas vraiment de porte de sortie. Je peux bien descendre en cours de route mais ce serait encore pire.

Une fois arrivé à destination, je suis rassuré, je vais dans une association pour les gens qui souffrent de troubles psychiques. C’est un peu un nomad’s Land ou je me sens bien. Je peux parler de mes problèmes et des gens sont là pour m’aider, si besoin.

Mais aujourd’hui, je n’ai plus la force de lutter et d’affronter le regard des autres.  Je vais devoir faire appel à ma famille pour me conduire. Ça m’agace un peu de dépendre d’eux mais je n’ai pas trop le choix.

C’est un peu un cercle vicieux, moins j’affronte mes angoisses et plus c’est difficile les prochaines fois.

Je sors de moins en moins. J’arrive encore à aller dans une grande surface à deux pas de chez moi mais tout juste. Il faut bien que je me nourrisse. Certaine fois je n’arrive plus à sortir de mon appartement.

Je ne sais plus comment m’en sortir.

Soirée chez une amie bipolaire

soirée amie bipolaire

Hier j’ai passé un peu de temps avec une amie un peu paumée. Elle souffre de troubles psychiques et suit un traitement contre les troubles bipolaires. Elle a une vie assez dissolue. Nous avons soupé chez elle. Elle consomme pas mal d’alcool et de produits stupéfiants, surtout le soir. Elle était assez amorphe après quelques verres et plusieurs joints.

C’est une jolie femme, intelligente et nos discussions étaient souvent coupées par de longs silences, pendant lesquels elle me regardait dans les yeux.

Elle est très dispersée et me parle souvent de projets professionnels qui n’aboutissent jamais. Chez elle, un petit appartement de 30 mètres carrés, tout est en désordre. Un matelas dans l’entée pour dormir et deux plaques électriques de cuissons dans la deuxième salle. Elle se contente de peu, ou plutôt par fierté, préfère ne pas demander autre chose que le RSA et recevoir tous les mois de l’argent de ses parents.

J’ai beaucoup d’affection pour elle nous partageons pas mal d’angoisses communes. Elle me racontait ne plus pouvoir conduire et surtout avoir très peur de prendre le volant sur les autoroutes ou pour traverser à pied un pont… Une fois pour rentrer chez elle en voiture, pris de panique, elle a dû passer à l’hôpital, pour qu’on lui donne un traitement pour faire la route.

C’est une fille qui vit sans cadre, avec des parents âgés qui ont du mal à comprendre sa maladie. Elle me voit comme quelqu’un qui a une vie assez réglée. Ce qui n’est pas tout à fait faux. J’ai la chance d’avoir des parents qui me soutiennent.