Décompenser et aller en HP

Visite chez ma psychiatre hier, en début d’après-midi. Je n’ai attendu que quelques secondes, dans une salle d’attente glaciale et sans fenêtres.  Le cabinet est situé dans une maison assez ancienne, rénovée de manière approximative. Dans son bureau, qui n’était pas bien éclairé, nous étions deux ombres face à face. Les discussions ont duré une quarantaine de minutes. Je n’avais pas grand-chose à dire. Je lui ai remis mon dossier médical. Elle était plutôt optimiste sur ma situation, en constatant le cheminement positif depuis 1998, année pendant laquelle j’avais commencé à décompenser sérieusement.

Aujourd’hui, j’étais un peu lasse de tous ces médecins que j’avais vu depuis cette époque. Je voulais juste un suivi pour ma prescription médicamenteuse et continuer à percevoir mon allocation. J’étais plus ou moins équilibré. Je ne souffrais plus et n’était pas angoissé. Je savais cependant que je pouvais encore décompenser, que je n’étais pas complètement à l’abri. Avec le temps, j’avais appris à vivre avec. J’avais tellement souffert, au point parfois d’avoir attenté à ma vie, que la situation actuelle ma suffisait. Je n’avais pas beaucoup de vie sociale et financièrement, j’avais juste de quoi payer l’essentiel. J’étais heureux car depuis plusieurs mois, je ne m’étais pas plié en deux de douleur dans mon canapé. Le soir, je profitais de mes soirées et n’allait pas me réfugier dans mon lit à peine le soleil couché.

Décompenser et aller en HP
Décompenser et aller en HP

Les médecins et les psychologues veulent que je sorte plus, que j’en fasse plus. Ce n’est pas eux qui sont dans le bus, quand j’ai une crise d’angoisse qui pourrait me faire décompenser. J’avais tant de fois été à la limite. J’avais passé des années complètes dans un autre monde, celui des délires. Aujourd’hui, mon cerveau a partiellement repris une configuration qui m’autorise à avoir de petits moments de bonheur.

Je me contente de cela, c’est tellement énorme et inespéré.

Espace-temps schizophrénique

Espace-temps d’un schizophrène
Espace-temps d’un schizophrène

Les volets sont fermés et l’intérieur de mon appartement et faiblement éclairé par une ampoule. Mon réfrigérateur presque vide ronronne. J’entends les voisins discuter, sans comprendre complètement ce qu’ils disent. C’est une présence humaine qui pourtant me rassure. La vie continue à l’extérieur. Par moment, j’ai l’impression de ne plus en faire partie et d’être dans un autre espace-temps. Je suis chez moi, avec cette solitude que j’ai apprivoisé. Je ne parle pas et ne fait aucun bruit. Je me demande ou je vais. Combien de temps peut-on tenir sans vie sociale ?

Cet après-midi, j’ai eu la visite de ma psychologue à domicile. Je commence à m’habituer à elle. C’est une des rares personnes qui rentre régulièrement chez moi. Elle ne perd pas l’objectif que nous nous sommes fixé, me faire sortir d’avantage. Petit à petit, elle m’aide à me synchroniser avec les autres et leur espace-temps. C’est un travail  de longue haleine et de répétition.

Ce matin, j’ai pris le bus. Je ne fais presque plus attention aux gens qui sont autour de moi. Je suis dans mon espace-temps. Malgré le monde, les odeurs de sueurs et les gens qui parlent tout seul, je regarde le paysage ou je tapote frénétiquement sur mon smartphone. Je n’ai pas envie d’échanger avec eux. Je souris parfois quand j’y suis obligé mais c’est purement de façade. Intérieurement, je suis gêné si quelqu’un m’adresse la parole.

Il est 20h et je ne suis pas fatigué. Pour une fois, je n’irai pas me réfugier dans mon lit pour ne plus avoir à réfléchir. Je vais passer une partie ma soirée devant un écran de télévision à regarder des gens, tellement éloignés de mon espace-temps.

J’angoisse aussi de voir les années passer et de ne pas en profiter. Mon visage se ride, mes cheveux tombent.

Comprimés, 3 fois par jour

Hier soir, j’ai eu beaucoup de mal à m’endormir. Les heures défilaient, ainsi que les comprimés de Temesta. En général cette molécule me met KO et je m’endors rapidement.  Hier soir, j’étais anxieux et rien ni faisait. Je tournais et me retournais dans mon lit, sans savoir si j’allais trouver le sommeil et la sérénité.

Comprimés, 3 fois par jour
Comprimés, 3 fois par jour

Le lendemain matin, après avoir réussi à dormir quelques heures, je n’étais pas en pleine forme. Il faut dire que la lecture de mon dossier médical, la veille, m’avait secoué plus que je l’aurais imaginé. J’avais été replongé en 1998, un autre siècle,  celui de ma première visite chez un psychiatre. J’avais pu lire les différents comptes rendus de cette époque. C’est surement aussi cela qui avait créé de l’anxiété et mon insomnie.

A peine réveillé, j’ai dû de nouveau prendre des comprimés. J’en avale 8 par jour et c’est toujours le même rituel. J’arrive ainsi à ne pas replonger dans des épisodes délirants. Mon traitement est assez offensif, comme j’ai pu le lire dans une autre lettre de mon dossier médical.

Je n’avais pas eu le choix, il me fallait ces documents pour mon nouveau psychiatre, dans le but de renouveler mon allocation.

La matinée était triste, autant dans ma tête dans le ciel. Le soleil était bien caché derrières d’épais nuages gris. A l’intérieur du bus, les gens avaient de pâles figures, comme s’ils prenaient eux aussi trop de comprimés.

Je voyais tout en gris. Je me sentais désarticulé, pas bien dans ma peau.

La journée a continué avec de nouveaux comprimés, pris loin du regard des autres, le midi, dans le local d’une association.

J’avais hâte renter chez moi, pensant que dans mes murs, je me sentirai mieux. Malheureusement, cela n’allait pas être plus bénéfique. Le ciel avec sa masse nuageuse couleur charbon était là aussi sur mes épaules. Il n’y avait nulle part où aller. Il fallait juste attendre que le temps passe.

Hospitalisations en milieu psy

J’ai changé de psychiatre il y a quelques mois et je viens de récupérer mon dossier médical. Ce n’est jamais agréable de se replonger dans le passé, en consultant les lettres des médecins, relatives aux diverses hospitalisations. On peut y lire tout un charabia technique.

Hospitalisations en milieu psychiatrique
Hospitalisations en milieu psychiatrique

Avant cela le matin, j’avais repris le bus. Je n’ai pas aimé le bruit des uns et des autres à l’intérieur. Je suis vite contrarié.  J’aime le silence et quand tout est calme. Malgré tout je n’ai pas eu d’angoisses. Une adhérente de l’association dans laquelle je vais, était juste à côté de moi. Elle ne m’a pas vu. J’ai un petit doute. C’est une femme d’une trentaine d’années, avec des jambes interminables. Elle est généralement vêtue de manière assez vieillotte. C’est toujours une aventure, quand on veut communiquer avec elle. Elle n’est pas très bavarde et de sa bouche ne sortent que très peu de mots, assez secs. Je ne pense pas qu’elle ait connu des hospitalisations en milieu psychiatrique.

A l’association, ils sont rares les adhérents qui n’ont pas connu d’hospitalisations en milieu psychiatrique.

Sur une lettre de mon dossier médical, j’ai pu lire que je voulais rationnaliser les épisodes délirants. Il m’a fallu des années pour accepter que se fût mon cerveau qui me jouait un mauvais tour. C’est tout un cheminement pour accepter la maladie. Au début, c’est vrai, je voulais expliquer mes délires pour qu’ils aient un sens. C’est moins traumatisant et cela fait moins peur que de ce dire qu’il n’y a pas d’explications, que c’est juste le cerveau qui dysfonctionne.

Sur une lettre, pour une des autres hospitalisations, il était inscrit « tentative de suicide ».  Cela fait froid dans le dos. Je n’étais pas délirant, mais juste en trop grande souffrance, pour faire l’effort de continuer à vivre.

Il y a encore quelques années, je n’aurai pas eu la force de me plonger dans cette littérature.

Danger au tournant

Premier repas en famille depuis leur retour, hier soir. Je m’étais habitué à vivre seul, ne comptant que sur moi-même. J’avais aimé cette adrénaline et ce danger. J’aurai pu avoir une crise et souffrir atrocement, à me cogner la tête contre les murs. Dans le passé, je me suis déjà mis en danger, en me passant une ceinture autour du cou. A cette époque, j’étais très mal et mon geste désespéré n’avait pas été jusqu’à son dénouement tragique.  Il n’en avait fallu de peu.

Danger
Danger

L’espérance de vie d’un schizophrène est moins élevée que pour le reste de la population. Les addictions, plus fréquentes, en sont aussi la cause. J’ai longtemps fumé cigarettes sur cigarettes, sans me soucier de ma santé et même avec le but, d’en finir plus rapidement avec cette vie qui avait été injuste avec moi.

Quand la souffrance est là, installée pendant des journées entières, il est difficile de vouloir trouver une raison pour continuer à vivre. L’on peut se mettre en danger, en ne regardant plus les voitures lorsque l’on traverse, dans le but de forcer de destin.

En même certaines fois, l’on peut se mettre en danger, croyant par exemple avoir le pouvoir de voler. Regardant le vide en dessous, en se disant que l’on va arriver doucement sur le sol et sur ses deux jambes, grâce à son pouvoir magique.

Le danger devient un compagnon, qui n’effraie plus et avec lequel on aime jouer. Jusqu’au moment où il est trop tard.

Heureusement pour moi, je suis encore là. J’ai aussi imaginé passer sous un train, pour être sûr de ne pas me louper.

Aujourd’hui, dans mon appartement et dans ma tête, la sérénité règne. Comme si un cap avait été franchi, en tout cas c’est ce que je me dis. Non, je ne souffrirai plus comme avant. C’est fini, j’ai trouvé mon équilibre.

Des propos bien illusoires, quand on connait cette maladie.

Trou dans lequel j’étais

Je m’habitue dans mon appartement, à l’autonomie et c’est agréable.  Cela fait une semaine que mes parents sont partis. Il y a quelques années. Au fond du trou, j’étais persuadé que j’allais finir dans une cabane au fond d’un bois. Je m’imaginais déjà SDF. A cette époque, je ne supportais plus la présence humaine. Je m’enfermais dans ma chambre pendant des jours entiers. Les délires étaient omniprésents, comme de longs voyages dans des univers parallèles. Je savais que je n’étais pas en état de travailler et je m’inquiétais pour mon futur, lorsque mes parents ne seraient plus là pour m’héberger et me nourrir.

au fond du trou
au fond du trou

C’était une époque sombre ou j’étais en conflit avec ma famille et mes amis. J’étais tout juste majeur. Au fond du trou, plus personne ne me comprenait et les gens s’éloignaient de moi. Le service militaire approchait et c’était une effroyable angoisse. Au bout de quelques jours de vie commune dans une caserne, j’aurai sans doute été reformé. Heureusement, juste à temps,  l’armée a été professionnalisée.

Mes parents, ne supportaient pas que je ne fasse rien de mes journées. Ils n’avaient pas conscience à ce moment-là, de la gravité de ma situation médicale. Ils voulaient que je travaille.

Au fond du trou, j’ai essayé malgré tout quelques petits boulots. A chaque fois, cela s’est terminé par un échec.

Il a fallu une hospitalisation en hôpital psychiatrique, pour mes parents comprennent la situation. Ils sont devenus alors beaucoup plus conciliants. Avec les médicaments, j’ai pu commencer une longue démarche qui continue encore aujourd’hui, pour sortir du trou.

Je pense être stabilisé. Ce matin, le soleil brille et je suis heureux. J’ai quelques rêves d’adolescent qui ne verront cependant jamais le jour. Quand je croise un ancien camarade de fac, j’ai envie de partir en courant.  Je ne souhaite pas répondre à leurs questions embarrassantes.

Débrouiller les idées

Un vent glacial souffle et les températures ressenties sont bien inférieurs  à  0 degrés. Le soleil parvient difficilement jusqu’à moi. Le bitume est blanc, à cause du sel déversé ces derniers jours. Je n’ai pas voulu prendre le bus. Peur de faire une crise  d’angoisse à l’intérieur. J’ai pourtant réussi à me déplacer en voiture, avec l’aide des uns et des autres. Quand mes parents sont absents, j’essaie de me débrouiller, de trouver des solutions.

Débrouiller les idées
Débrouiller les idées

A l’association de patients, chacun tente de se débrouiller comme il peut. Une adhérente schizophrène et enceinte, a dû arrêter son traitement pour ne pas mettre en jeux la vie de son bébé. Elle n’est pas délirante et plutôt bien de sa peau. D’après l’un de ses amis qui est venu me parler, l’association l’aide beaucoup à se stabiliser.

Moi, c’est les neuroleptiques qui me stabilisent. J’essaie de me débrouiller avec toutes mes phobies, qui sont autant d’obstacles dans la vie de tous les jours.

J’ai par exemple peur de monter dans une grande roue, dans un ascenseur, ou dans un bus… Je n’aime pas me sentir enfermé.

A l’association, les adhérents n’ont pas une étiquette sur leur front, avec leur pathologie marquée dessus. Pourtant parfois certains m’en parlent. C’est tout un groupe qui s’entraide et essaie de se débrouiller.  Je commence à connaître un peu les maladies psychiques. Je pense à Madeleine qui est bipolaire. Elle peut arriver souriante et 5 minutes plus tard fondre en larme. C’est une femme imposante qui peut aussi partir dans des colères noires. Elle est comme un ouragan, un volcan.

Parfois certains racontent qu’ils ont eu un geste violent pendant une crise. Cela reste cependant anecdotique et de l’ordre du coup de poing. Des gestes qui sont loin de la violence que les psychotiques portent sur leurs épaules, dans l’imaginaire collectif.

Parenthèse enchantée

Mes parents sont partis depuis une semaine et je me sens un peu plus libre qu’avant. Je peux maintenant concevoir de vivre seul. Il n’y a pas eu de souffrances, d’angoisses… Je sais que je ne suis pas guéri, que c’est une parenthèse enchantée, alors j’en profite.

Je suis allé à l’association de patients ce matin. J’ai du gérer la visite d’un plombier, suite à une fuite d’eau. De sa bouche sortait des relents d’alcool. C’est un peu tôt à 10h du matin pour avoir pris l’apéritif. Malgré tout, le travail a été effectué avec sérieux et qualité.

La plus part des personnes qui viennent dans les locaux, comme ce dernier, ne se rendent pas compte un seul instant qu’ils sont entourés de schizophrènes, de dépressifs et de bipolaires…

Les aprioris ont la vie dure. Il y a quelques jours, j’avais parlé avec Pierre. Lui aussi sentait l’alcool à 9h00 du matin. C’est un adhèrent qui ne reste jamais très longtemps. Il passe en coup de vent. Il est schizophrène, comme moi. En discutant, il m’a avoué boire plus de 10 canettes de bière par jour. Il veut travailler, changer de vie. Il mérite bien une parenthèse enchantée. Il n’est pas très stable et se pose beaucoup de questions sur le regard que les autres portent sur lui. Il est un peu parano.

parenthèse enchantée
parenthèse enchantée

De fil en aiguille, en discutant avec les uns et les autres, les adhérents finissent par raconter leurs problèmes de santé.  Assez rapidement, j’arrive à la limite de mes compétences en psychologie. Je demande alors, « et ton psychiatre, il en pense quoi ? »

Je préfère ne pas donner de mauvais conseils. Je suis le président de cette association, alors j’ai une certaine forme d’autorité.

Demain, je vais y retourner. Cela me fait une parenthèse enchantée dans la journée. Et surtout, cela met en place un cercle vertueux, en m’encourageant à sortir d’avantage. Le plus dur c’est d’amorcer la pompe. J’ai sinon tendance à me replier sur moi et la solitude engendre les souffrances et les angoisses. C’est malgré tout, un combat qu’il faut mener chaque jour, au réveil, dès le premier pied posé par terre.

Heureux, l’êtes-vous ?

heureux
heureux

Belle journée d’hivers, le soleil brille et les rayons façonnent le paysage de milles éclats. Ce matin, une liste de nombreuses choses à faire s’est imposée à moi. J’étais excité et heureux à la fois. Je ne me suis rendu compte qu’à 9h30 que je n’avais pas pris mes médicaments. Heureusement il n’était pas trop tard. Cela ne m’arrive jamais.

Toutes ces tâches que j’avais à effectuer, ont rempli ma matinée et je ne pouvais pas faire autrement que de toutes les réaliser. C’était plus fort que moi.

Une fois mon objectif atteint, j’étais heureux, comme à la fin d’une journée bien remplie.

Il n’y avait pourtant rien d’extraordinaire, des courses, des lessives et du ménage…

Demain, je vais aller dans une association qui est composée de personnes en souffrance psychique. Un lieu à part, ou les fragilités et les propos délirants peuvent s’exprimer librement.

Tous les adhérents sont heureux qu’un tel endroit existe dans leur ville. Ils y a sur les murs dans le local, des dessins assez simples mais joyeux. Une cuisine avec des plaques de cuissons et surtout un four à micro-ondes qui réchauffe les plats préparés des adhérents.

Cela fait plusieurs jours que mes parents sont partis en vacances. Je suis heureux de vivre ma vie, de façon autonome. C’est même un soulagement. Bien sûr je ne sors pas beaucoup de chez moi, mais c’est aussi comme cela quand ils sont là.

Le fonctionnement de mon cerveau m’échappe. Il peut me rendre heureux ou me faire vivre l’enfer.

Aujourd’hui, les délires qui arrivent parfois comme des chevaux fous, incontrôlables et s’imposant comme une évidence, m’ont épargnés. Il faut quelques jours pour se rendre compte que l’on est du côté obscur de la force, parfois une vie d’autres fois jamais.

Mais la vie est ainsi, pleine de mystères et le premier d’entre eux, sa justification.

Humaines, avez-vous ces qualités ?

qualités humaines
qualités humaines

Ce matin je suis allé à l’association de patients. L’animatrice est venue me chercher. Le sol était couvert de glace et de neige, qui même avec le passage incessant des roues des voitures, restait glissant. Toutes les activités humaines avaient été mises au ralenti. Les bus ne circulaient plus. Les gens étaient emmitouflés dans d’épais vêtements, et de leurs bouches sortaient de la vapeur qui se transformait immédiatement en un nuage blanc.

Je n’avais quasiment vu personne depuis 4 jours. A l’association, la présence humaine me fit du bien. Je ressentais une grande joie dans tout le corps. Je n’étais vraiment pas fait pour cette solitude que ma maladie m’imposait.

J’avais été un peu anxieux hier soir, à l’idée de m’éloigner de mon quartier. Les adhérents étaient comme je les avais quittés. Ils se confiaient, me parlant de leur maladie et me demandant s’ils avaient le droit de téléphoner, de prendre une feuille sur le bureau ou de faire du café. Ils avaient de nombreuses qualités humaines, comme celle d’être respectueux du lieu où ils étaient. Ils savaient que cette association était un havre de paix qu’ils voulaient sauvegarder.

Parfois, il y avait des pleurs, des crises mais personne ne se jugeait.  Ils y avaient presque toutes les maladies psychiques, schizophrénie, dépression, trouble bipolaire…

Dans la vie courante, ou chacun doit être performant, les gens n’ont pas ces qualités humaines, comme celle d’entendre les délires d’un psychotique et de continuer comme si de rien n’était à boire le café.

Moi, j’étais président ce cette association, mais je ne parlais jamais de mes problèmes. Personne ne connaissait ma pathologie.

C’était mieux ainsi, de toute façon, je voyais en dehors assez de psychologues et de psychiatres, pour évoquer mes souffrances.

Les qualités humaines sont rares, et c’est parfois chez les gens les plus en marge de la société, qu’on en trouve le plus.