Réveillé à une heure du matin, je vis mieux la nuit. La journée je souffre trop. Parfois, il m’arrive de réfléchir à l’éducation que j’aurai donné à mon fils, si j’en avais eu un. Comment apprendre que la vie est une longue période de souffrance. Comment préparer quelqu’un à ça, à la schizophrénie, aux tentatives de suicides, aux angoisses… Je suis heureux de vivre seul, sans enfants, dans le cas où le caractère héréditaire ce cette maladie l’aurait touché.
Je veux vivre ma vie le plus simplement possible. Avec un toit sur la tête et de quoi manger.
Aujourd’hui je ne vais pas aller à l’association de patients. J’espère qu’une journée sereine, bien que déjà largement entamée m’attend.
Je vais éviter au plus possible les êtres humains. Il me faut ça régulièrement. Je vais aussi laisser vagabonder mon cerveau, l’autoriser rêver un peu…
Vers 16 heures, je commencerai tout doucement à me préparer pour la nuit.
Avant cela j’irai quand même faire rapidement quelques courses. Mon estomac crie famine. J’attends avec impatience que les magasins ouvrent. Avec toujours, le souci de ne pas dépenser ce que je n’ai pas. Je ne me plaints pas trop, je touche l’allocation adulte handicapé. Depuis de nombreuses années maintenant. Il y a pire.
Je me souviens encore du jour ou mon père est venu avec moi, lorsque j’avais vingt ans, pour me faire reconnaitre adulte handicapé, dans le but me faire travailler en milieu protégé. Ce fut un véritable coup de poing dans la poitrine.
Je ne veux pas cela pour mon fils.
Je me souviens aussi du dimanche matin. Ou il m’a interné sous la contrainte.
Il a fait ce qu’il fallait peut-on penser. Mais quand on doit le vivre, ce n’est pas la même histoire.
Aujourd’hui, deux décennies plus calmes se sont écoulées, heureusement.