Je tremble

Tremble
Tremble

L’horreur du réveil à 4 heures du matin. Il fait nuit noire dehors. Je tremble, je me sens mal. Je n’arrive pas à me rendormir, je me lève. Je fume 5 cigarettes en 1 heure. Je regarde la télévision ou j’écoute de la musique en angoissant. J’attends 7 heures du matin pour aller à la boulangerie, je tremble. Une fois mon lourd traitement avalé, je me sens un peu mieux. Ce n’est pourtant pas l’extase.

Un peu plus tard, je tremble toujours, j’ai peur. Je vais faire quelques courses avant que le monde n’envahisse frénétiquement la grande surface pas loin de chez moi. Il est encore un peu endormi ce supermarché, et cela me convient. Je n’ai plus la force d’y aller en pleine après-midi, quand je risque de croiser des dizaines de regards, comme des lasers me transperçant de part en part. Dans ces moment-là mes jambes trembles et j’ai l’impression de m’envoler, de quitter la surface rassurante du sol. Mon esprit est dans un autre monde, prêt à vaciller dans un gouffre sans fond.

Hier après-midi, un ami est passé me voir. Cela m’a fait du bien. Il s’appelle Pierre et je le connais depuis assez longtemps. Il n’y a que récemment que je lui ai annoncé que j’étais schizophrène. Quand je lui ai dit ma pathologie, c’est comme si je lui avais mis un coup de poing dans le ventre. Je n’avais jamais réalisé la violence d’une telle annonce. Heureusement cela ne le dissuade pas de venir me rendre visite de temps en temps.

Nous sommes le 11 novembre 2015, et de plus en plus je pense à la mort. Je me dis qu’elle viendra inexorablement un jour. J’espère ne pas la sentir venir et ne pas avoir mal. J’espère que mon calvaire terrien prendra fin.

En tapant sur mon clavier je tremble. C’est la peur, l’angoisse.

Les yeux bleus

Yeux bleus
Yeux bleus

Il est 14 heures. Je suis fatigué de faire des allés et retours dans le centre commercial pas loin de chez moi. Je ne supporte plus de rester seul dans mon appartement. J’ai envie de voir un peu de monde. Justement, il y a 1 heure dans la grande surface, j’ai croisé le regard d’une femme, les yeux bleus, profonds… Une forte intensité s’est dégagée de cet échange et j’ai eu une angoisse. Ils étaient tristes ses yeux. Je ne sais pas ce qu’elle a vu dans les miens. Surement de la fatigue, de la peur et de la souffrance aussi.

En ce moment je me réveille de bonne heure, vers 5 heures du matin. A peine les yeux ouverts une angoisse m’envahit. Je tourne en rond dans mon appartement sans arriver à me recoucher. Mes yeux scrutent l’horloge, pour attendre 7 heures et prendre les médicaments qui me soulageront. Avant cela, je suis terrorisé. Quand le soleil se lève, de plus en plus tard malheureusement, je retrouve aussi un peu de sérénité.

Je ne sais plus quoi faire pour que mes idées envahissantes me laissent un peu tranquilles. Je ne sais plus quoi faire pour avoir confiance en l’avenir. J’ai peur de tout. Dehors quand je marche, je baisse la tête. Je n’ai plus la force de diriger mes yeux droits devants.

Récemment j’ai pris du Tercian. C’est super contre les angoisses mais c’est très sédatif. J’étais un peu comme un zombie. Mes yeux étaient perdus dans le vide et les voix des autres étaient comme lointaines. Je ne savais plus avoir une discussion construite.

Je dois voir ma psychiatre vendredi. J’espère qu’elle pourra m’aider. J’espère que notre échange pourra m’apaiser un peu. J’ai besoin de lui parler. Qu’elle me rassure et peut être modifier mon traitement. Encore quelques jours avant notre prochain rendez-vous.

Boule au ventre

boule au ventre
Boule au ventre

Il est 14h00 et le soleil est enfin apparu. Je traine depuis ce matin une boule au ventre et un mal être profond. La journée avait pourtant bien commencé. J’avais réussi à prendre le bus pour aller à l’association de patients. Sur un coup de tête, j’avais décidé de ne pas demander à mon père de me servir de chauffeur, en faisant fi de mes angoisses. Dans le bus, je m’étais installé à l’avant pour ne pas voir la foule qui le remplissait. Je n’aime pas croiser les regards d’inconnus dans un lieu clos. Je n’aime pas la promiscuité non plus. Cela m’angoisse. Il était onze heures quand je suis rentré chez moi. C’est à ce moment-là que la boule au ventre est apparue. Quand j’ai ouvert la porte de mon appartement. C’est un lieu de souffrance et de solitude. Heureusement mon téléphone portable sonna. C’est mon père qui m’invitait à venir manger chez lui. Malgré tout chez mes parents, la boule au ventre continuait de me faire souffrir. En arrivant, ma mère m’avait demandait si j’allais bien. Sans réfléchir j’avais répondu oui. Le repas fut une intense souffrance. Je ne savais plus quoi faire pour me sentir bien. Il n’y avait aucune solution, juste attendre que le mal être passe. Mon père, lors du repas, avait animé la discussion. Ma mère avait posé de temps en temps quelques questions. Moi je donnais un coup de main par-ci par-là.

De retour chez moi, l’après-midi allait être longue. Ma boule au ventre et mon mal être s’était calmés. Je m’étais installé devant mon poste de télévision. J’avais envie de bouger de voir du monde. Peut-être essaierai-je d’envoyer quelques sms à des amis qui travaillant, n’auraient pas beaucoup de temps à me consacrer.

Dans mon appartement, je pouvais entendre les ouvriers en train de rénover l’appartement d’à côté. Je me sentais un peu moins seul.Mon ventre ne me faisait plus mal.

Se sentir bien

Se sentir bien
Se sentir bien

La solitude l’après-midi est terrible. Tout est beaucoup trop calme. Mes idées me semblent à peu près calmes, pourtant je ne me sens pas si bien que cela. Dehors le brouillard ne s’est pas levé, comme une chape de plomb sur la ville et sur mon esprit. J’ai fait quelques sorties dont une ce matin à l’association de patients. Il y régnait une ambiance chaleureuse. C’est l’un des seuls lieux dans lequel je me sens bien. L’animatrice avec sa voix calme et ses gestes lents rassure. Elle se mêle tout le temps au groupe d’adhérents. Dans cette association la solitude n’existe pas. Malheureusement je n’arrive pas tout le temps à prendre le bus pour m’y rendre. J’ai parfois besoin d’un chauffeur pour faire le trajet. Je fais appel à mes parents même si je ne vis pas chez eux.

Mes parents sont un roc sur lequel j’essaie de me raccrocher quand je ne vais pas bien. C’est un peu triste de n’avoir pas grand monde à part eux. J’ai souvent besoin de leur présence. Ma pathologie me perd dans les méandres, je suis dans la forêt sans boussole. Mes parents sont souvent là pour écouter le vieux fou que je suis. A qui demander cela ? Un psychiatre que je vois une fois par mois ? Des amis qui ont un travail et ne sont pas souvent disponible ? Une société dans laquelle chacun vit pour lui-même. Si tu n’as pas ta Rolex à cinquante ans tu as raté ta vie, j’avais entendu une fois d’un homme que tout le monde écoute et qui passe à la télévision.

Je ne suis pas grand-chose, la solitude est une chaine qui ne se brise pas facilement. Mon handicap qui me tord souvent le ventre ne me permettra pas d’avoir de Rolex. J’en suis loin. Je voudrai juste être bien et ne plus avoir mal.

Fatigué de cette maladie

fatigué
Fatigué

Une journée qui a commencé  tôt, vers 5h00 du matin. Je n’étais plus fatigué, impossible de me rendormir. J’étais anxieux, les volets fermés, le silence dans l’immeuble et ma télévision qui envoyait des images multicolores. Il fallait que je tienne encore deux heures pour prendre mon traitement, à sept heures du matin. J’avais les yeux fixés sur mon horloge, pressé d’avaler mes comprimés. Vers huit heures du matin, un sentiment de bien-être m’a envahi. C’est le temps qu’il faut pour que mes pilules fassent leurs effets. Dehors, le soleil s’était levé. Les gens commençaient à circuler dans les rues, en voiture, dans les bus…

Je n’allais pas faire grand-chose encore de cette journée. A force de solitude, les idées envahissantes se déchainent. Le matin, mon père est venu me rendre visite pour régler un petit problème de tuyauterie. Je suis fatigué de cette vie. La plupart de mes amis travaillent. Ils ne viennent pas souvent me voir et moi je n’organise jamais rien.

Le repas du midi chez ma mère fut agréable. Elle ne comprend pas vraiment que je souffre à ce point-là. Pour elle, j’ai un traitement, je parle normalement, donc tout va bien. Et puis moi quand on me demande si je vais bien. Je réponds toujours « oui ». Pourtant dieu sait que je souffre, d’angoisses, de boule au ventre, de mal être, de sentiment d’étrangeté…  J’aimerai quelle me réconforte de temps en temps. Rarement quand je lui dis que je ne me sens pas bien, elle s’exclame d’un air étonné puis change de conversation. Je ne lui en veux pas. C’est comme ça. Chacun fait ce qu’il peut.

Mon père est beaucoup plus à l’écoute et se plie en quatre pour moi. Il n’est pas fatigué de m’entendre dire que je ne me sens pas bien. Il change de conversation de plus en plus souvent lui aussi. Il ne faut pas que je ressasse mes problèmes, je me dis alors dans ma tête.

Mes angoisses

mes angoisses
mes angoisses

L’anxiété, les angoisses qui se manifestent lors d’un réveil nocturne. Il est 2 heures du matin. Je me précipite dans mes toilettes pour vomir. C’est une des angoisses qui passe. Ca va un peu mieux après. Dehors, il fait nuit noire. Quelques minutes plus tard, j’entends du bruit chez mon voisin de palier. Un interrupteur qui est actionné et une porte qui s’ouvre. Mon vomissement rauque et venant du plus profond de mon être a dû le réveiller. Je ne sais plus quoi faire pour me sentir bien. J’essaie de me calmer en retournant dans mon lit, je n’arrive pas à me rendormir. Je m’installe alors devant la télévision. Je fume cigarettes sur cigarettes. C’est horrible. Je dois attendre 7 heures pour prendre mon traitement, voir le soleil se lever, me détendre et sentir mes angoisses se calmer.

Depuis quelques jours, je ne suis pas en forme. Mon esprit est une prison dans laquelle mes peurs tapent toute la journée, sans me laisser beaucoup de répit. Je voudrais être pris en charge à 100%, ne plus m’occuper de rien. Tout me fait peur et plus rien n’est certain, comme la clef qui est dans ma poche en sortant de chez moi. Je vérifie quelle y est bien. Je sens cette clef mais pourtant je vérifie encore et encore.

Mes angoisses m’empêchent aussi de sortir trop loin de chez moi. Je n’arrive plus à prendre le bus pour aller en ville. Mon appartement est une prison et les barreaux sont dans ma tête. Il faudrait ouvrir mon crâne et réparer. Un petit coup de tournevis par-ci et par-là me ferait le plus grand bien.

J’essaie aussi de lutter contre mes angoisses, tout seul. Le combat n’est pas très équitable. J’ai l’impression de me battre avec une épée de bois, contre une armée dont les armes en métal et pointue, étincellent au soleil.

Mon bateau pris dans la tempête

Bateau
Bateau

Un dimanche seul dans mon appartement qui est comme un bateau. Dehors, de l’autre côté de la porte, il n’y a personne. Juste une tempête qui fait rage, avec des déferlantes qui viennent taper les murs. Ma famille est partie pour la journée et tous les magasins sont fermés. Je n’ai pas beaucoup de raison de quitter le bateau, mon appartement.

Je me suis réveillé vers 6h00. Il faisait nuit noire. Les neuroleptiques et anxiolytiques m’ont mis dans un état assez euphorique. Je n’étais pas anxieux. Mon bateau naviguait sur une mer calme.

Puis l’ennui et la solitude ont réactivé mes angoisses, quelques heures plus tard. Le dimanche est le jour de la semaine que j’aime le moins. C’est une longue traversée qui se répète toutes les semaines. Ce jour-là, je compte les heures qu’il me reste avant d’aller me coucher.

Demain, je vais surement aller à l’association de patients. C’est une sortie qui me fait du bien. J’y rencontre parfois des gens intéressants. Le matin surtout, car l’après-midi mon appartement est comme un piège, un bateau sur le point de couler. Je m’accroche désespérément à mon canapé pour ne pas sombrer. Je fais aussi des allers retours dans mon lit quand la souffrance est trop forte.

Je fais parfois quelques recherches sur internet, pour voir si des découvertes ont été faites sur ma maladie. C’est souvent prometteur, mais pour l’instant rien de concret.

Nous sommes dimanche et il me reste encore de longues heures de solitudes. Dehors, le ciel est menaçant. A l’intérieur tout est calme. J’ai éteint la télévision et je peux entendre le ronronnement du réfrigérateur.

Je suis doucement bercé par les médicaments que j’ai pris ce midi. Je suis un peu engourdi. J’ai envie de ramener mon bateau à quai, pour retrouver la vie dont j’ai été éloigné par ma terrible pathologie.

Première matinée de la semaine

Matinée
Matinée

Matinée passé à l’association de patients. D’habitude je reste dans le local debout, à marcher d’une pièce à l’autre, en discutant avec chacun. Ce matin j’ai pris la peine de m’assoir autour d’une table, ou tout le monde buvait un café. L’ambiance était agréable et après le weekend, ça m’a fait du bien de voir du monde et de sortir de chez moi. Eléonore était là. Nous ne l’avions pas vu depuis plusieurs jours. Elle était en larmes à cause de petits problèmes qui prenaient pour elle des proportions gigantesques. Personne ne savait plus quoi faire pour lui redonner le moral. Elle était complètement effondrée. Elle avait le teint blême et avait déjà rendu visite à son psychiatre, qui lui avait dit de prendre sur elle et n’avait pas voulu l’hospitaliser. Eléonore est une femme à la retraite qui a des hauts et des bas. Elle vit dans une maison qui n’a pas été rangé depuis trop longtemps. Des vêtements et des restes de nourriture trainent un peu partout.

Lors de cette matinée, j’ai aussi appris qu’une adhérente, hospitalisée en psychiatrie et maman d’un fils de quatre mois, va être placé dans un centre ou elle ne sera plus séparée de son fils.  C’est plutôt une bonne nouvelle.

Pendant de cette matinée et après avoir discuté avec des adhérents un peu plus en formes, j’ai pris le bus pour rentrer chez moi. C’était un véhicule assez ancien que le chauffeur conduisait en donnant de grands coups de frein. Il y avait toutes sortes de passagers. Un homme avec le nez écrasé était assis pas loin de moi. Ce devait sans doute être un boxer. Il en avait le visage marqué.

J’étais content de retrouver mon appartement, même si après cette matinée, je savais que j’allais être seul le reste de la journée. Il fallait que je trouve la force me faire à manger et de faire la vaisselle.

Solitude le weekend

Solitude
Solitude

La solitude me gagne. Ce matin, alors que le jour était à peine levé, chaque pas pour m’éloigner de chez moi était une angoisse. Je me dirigeais vers la boulangerie. La vendeuse, toujours souriante était bien contente de récupérer mon argent.

C’est le weekend et c’est un moment de solitude que je n’aime pas beaucoup. Le samedi commence et ma souffrance s’installe. Deux jours  à regarder les minutes passer. Heureusement le samedi matin, je peux aller faire quelques courses dans le supermarché pas loin de chez moi. Je vois un peu de monde à l’ouverture. Pas trop sinon j’ai des angoisses. Les acheteurs sont devant une grille, qui fait un bruit de ferraille en s’ouvrant. Tout le monde se précipite à l’intérieur du magasin pour profiter des dernières promotions. La solitude est un peu moins présente dans cette cohue. Je marche à vive allure sans regarder personne dans les yeux. De retour chez moi, seul, je m’installe devant la télévision pour deux jours.

Hier, je suis allé à l’association de patients. Je n’ai pas eu la force de prendre le bus pour me déplacer en ville. J’ai dû demander de l’aide à ma famille pour me conduire. Dans le local de l’association, je me suis assis à côté des autres adhérents. La solitude était un peu moins présente, entouré des miens. J’ai eu connaissance de cette pauvre maman d’un enfant de quelques mois, adhérente de l’association, qui avait dû arrêter son traitement pendant la grossesse et qui a été hospitalisé en psychiatrie. Son enfant a été placé en pédiatrie en attendant une décision sur son avenir. Je me pose encore la question de savoir pourquoi une fois accouché, elle n’a pas repris ses médicaments.

Là je suis chez moi et pas grand-chose ne vient troubler le silence de ce samedi matin, et ma solitude. Un camion poubelle passe, je regarde le travail des éboueurs et cela m’occupe pour quelques minutes. Dehors, malgré la saison, le froid vient piquer le visage.

Mon esprit est une prison

Prison
Prison

Mon cerveau est une prison. Les douleurs sont à l’intérieur et je n’arrive pas à les extraire de cette boite. Je suis seul face à mes pensées, mes angoisses, mes craintes. Je m’installe sur mon appui de fenêtre le matin, pour fumer la seule cigarette de la journée. Les idées négatives arrivent à vive allure, dans cette prison qu’est mon cerveau.  Tous les matins je regarde le vide devant moi, accoudé à mon appui de fenêtre, et l’envie de faire le grand plongeon est là. Il faut alors que je ferme la fenêtre pour penser à autre chose.

Je ne suis plus vraiment dans le même monde que vous. Mon objectif est de m’évader de cette prison. Je cherche alors comment aller mieux mais je ne trouve pas toujours.

Ce matin s’était la réouverture de l’association de patients. Il était temps, cela faisait longtemps que je n’avais parlé à personne en chair et en os, à part ma famille. J’y suis resté deux bonnes heures et cela m’a fait du bien.

J’ai repris le bus pour rentrer dans une autre prison qu’est mon appartement. Le silence d’une vie en solitaire était assourdissant. J’ai juste allumé la radio pour faire une présence. Les chansons ne me plaisaient pas. J’ai zappé pendant de longues secondes pour trouver un accord qui ne me fasse pas souffrir ou me rappelle de mauvais souvenir.

Je me suis alors installé dans mon canapé, le lieu dans lequel je passe la plupart de mon temps. Il est assez confortable et avec mon traitement sédatif, je n’ai plus vraiment la force d’y sortir.

L’après-midi se passe comme cela, devant la télévision qui m’angoisse encore plus, à force de regarder toutes les horreurs du monde. Parfois, lorsque l’information est vraiment dure, j’ai les poils qui se hérissent. L’être humain est vraiment capable du pire.