Loin de chez moi

Loin de chez moi
Loin de chez moi

Je suis seul chez moi, ma famille est à plusieurs centaines de kilomètres, loin de chez moi. J’ai tout un sac rempli d’angoisses. J’ai peur de perdre mes clefs quand je sors, j’ai peur de tout…  Ma famille est partie il y a 3 jours maintenant. Les deux premiers jours furent les plus compliquées. J’étais sur le fil, j’aurai pu basculer d’un instant à l’autre.

Aujourd’hui dimanche est un autre jour. Je commence à me faire à l’idée. Je fais des allés et retours, chez mes parents pour nourrir le chat. Ce matin, je me suis aperçu qu’il y avait une légère fuite d’eau dans leur garage. J’ai fait appel à un voisin. Ce n’était pas grand-chose et l’homme assez corpulent, m’a donné une claque sur l’épaule, une fois le problème réglé. Je lui ai parlé de mes angoisses sans lui dire que j’étais schizophrène. Je ne sais jamais comment les gens reçoivent une telle annonce.

Le dimanche est un jour un peu compliqué. Tous les magasins sont fermé et je ne peux aller faire ma balade dans le centre commercial pas loin de chez moi. Paradoxalement, me fondre dans la foule pour quelques minutes me fait du bien. Aujourd’hui je ne peux pas.

J’ai un ami qui doit venir chez moi cet après-midi. Je me sentirais moins seul, moi qui n’ai pas eu beaucoup de contacts humains depuis trois jours. C’est un homme de 33 ans, souvent seul lui aussi, vivant chez ses parents et ayant des difficultés psychique, sympathique, mais l’un n’empêche pas l’autre.

Demain, ma psychologue à domicile doit venir à 14h00. Ce sera l’occasion de faire le point avec elle de ce début de semaine. Cela va casser un peu ma solitude. En effet lorsque mes parents sont loin de chez moi, je n’ose plus prendre le bus pour aller en ville. Il n’est alors plus question d’aller à l’association de patients, tout seul. Je dois m’y faire conduire par l’animatrice.

Puzzle démonté

puzzle
puzzle

Le ciel est gris, je ne me sens pas très bien. Je me sens fracturé, comme un puzzle démonté dans une boite. Comment remettre tout cela en ordre. Je ne peux pas. Je n’arrive plus à me concentrer plus de 5 minutes. Ce matin, je n’ai pas réussi à prendre le bus pour aller à l’association de patients, en ville. J’ai dû demander à mon père qu’il me conduise.

Justement, mes parents doivent partir une semaine en vacances dans quelques jours et c’est cela qui me mine le moral. La solitude ne me réussit pas et à part mes parents, je n’ai pas grand monde sur qui compter. J’ai l’impression d’être perdu dans l’espace, sans apesanteur ni repaire.

A l’association de patients, je me sens mieux pourtant. Je suis avec du monde et l’on discute le bout de gras, dans un local dans lequel je me sens à l’aise. Il y a une animatrice, blonde, avec des formes et souvent rassurante. Elle écoute les petites ou grandes misères des adhérents, avec une épaule bienveillante. Je m’entends bien avec elle. On est souvent sur la même longueur d’onde.

Mais là, chez moi, en ce début d’après-midi et malgré de timides éclaircis, je me sens comme un puzzle, qui aurait besoin de longues heures de patiences pour être remonté. Je regarde l’heure fixement, toutes les minutes. En espérant qu’un hypothétique bien être, veuille bien se manifester.

Mon appartement est silencieux. J’ai éteint la télévision, je n’ai trouvé aucun programme intéressant. Je mettrai peut être un peu de musique pour casser la solitude. Malheureusement, c’est dans ces moments d’oisiveté, que les idées angoissantes me harcellent, m’obligeant à m’aliter.

J’ai envie de bienêtre et d’une plage de sable fin. De n’avoir jamais connu cette morsure qu’est la schizophrénie. Je voudrais être indemne de toutes ces souffrances.

La boule au ventre

boule au ventre
Boule au ventre

Le réveil vers 7 heures du matin, un dimanche, fut assez dur. A peine les yeux ouvert, une boule au ventre s’est manifestée. Dehors, la nuit noire écrasait le paysage, donnant encore plus l’impression d’être dans un bateau en pleine mer. Comme des phares, les lampadaires prévenaient du danger, au cas au j’aurais voulu quitter mon appartement.

La boule au ventre était encore présente quand je me suis mis dans mon canapé pour fumer quelques cigarettes. La bouche sèche à cause du lourd traitement que je prends, donnait une sensation désagréable à chaque fois que j’aspirai une bouffée. Il fallait que j’avale du liquide.

Assez rapidement, le traitement que je prends trois fois par jour a fait son effet. Je me suis senti un peu mieux, moins angoissé. Pourtant la boule au ventre était encore là, au centre de l’estomac. Elle était bien au chaud et ne voulait plus partir.

Quelques minutes plus tard, sous la douche, une impression étrange m’a envahi. Mon corps me paraissait comme ne plus faisant partie de moi. Mes bras, mes jambes étaient comme des appendices, qui ne m’appartenaient plus. Une angoisse commençait à monter. Mon cerveau commençait à se brouiller. Il fallait vite que je me sèche.

Le dimanche est le jour de la semaine que j’aime le moins. Je ne peux pas aller me balader dans le centre commercial pas loin de chez moi et c’est le jour du repas en famille. Un repas que je préférai éviter. Le côté maternel de mon père est insupportable, et les remarques de ma mère fatigantes.

Heureusement, une ou deux heures après ma douche, la boule au ventre est partie. Le soleil s’est levé, inondant de lumière mon petit appartement. J’avais quand même de grandes difficultés à me concentrer, et mes muscles tendus, me faisaient souffrir.

Repas sans légumes

repas
repas

Cette matinée d’abord pluvieuse, a laissé place à un soleil d’hiver. Il ne chauffe vraiment qu’à travers les vitres. Je viens de finir d’avaler mon repas. Il ne m’aura fallu que quelques minutes. En plus, je ne mange pas très équilibré, pas assez de légumes.

Hier après-midi, j’ai fait fi de mes angoisses et un ami est venu me chercher pour aller boire un verre en ville. C’était une personne que je ne connaissais pas vraiment et le courant est plutôt bien passé. Nous étions dans un pub anglais, et nous avons choisis de nous installer dans un endroit à l’abri des regards et des oreilles. En effet, c’est une personne qui a aussi des problèmes psychiques, et bien que nous n’ayons pas parlé que de cela, nous ne voulions pas être entendus. Nous avons prévu de nous revoir dans une semaine et pourquoi pas avec d’autres amis en commun pour un repas.

De retour chez moi, je me sentais bien. C’est la solitude qui me mine. Des journées complètes, tout seul, à ressasser les mêmes angoisses. Il faudrait que je sois toute la journée à l’extérieur de chez moi, et en activité avec du monde, dans un cadre rassurant. Il y a bien des hôpitaux de jour, en ville, mais je n’arrive pas à cause de mes angoisses à me déplacer facilement. C’est le serpent qui me se mord la queue.

Il est encore tôt et je ne sais pas commun cette après-midi va se passer. Je vais sens doute sombrer dans l’ennui mais j’espère que non. Pas envie de me sentir mal encore une fois. Je vais essayer d’ouvrir un livre et de voir si j’arrive à me concentrer.  Malheureusement je commence à sentir mon état psychique de dégrader tout doucement. La fatigue, l’ennui, le repli sur soi et la souffrance.

Mon canapé

Canapé
Canapé

Je ne me sens pas bien du tout cet après-midi. La tête dans un étau. Un sentiment de mal être qui me plonge dans un abime noir, sans lumière. Je m’installe dans mon canapé à la recherche d’une occupation quelconque qui pourrait me changer les idées. J’allume la télévision. Ce n’est pas facile, je zappe de chaine en chaine sans trouver mon bonheur. Au contraire cette dernière me fait du mal. Plus je la regarde et moins je me sens bien. J’éteins alors mon petit écran. Soudain, le silence devient assourdissant. Je mets un peu de musique pour me tenir compagnie. Pareil, je me sens mal. Mon corps tout entier réclame une personne de chair et d’os avec qui échanger. Tous mes amis sont au travail et puis je ne peux pas les faire venir comme ça en claquant des doigts. Il n’y a personne dehors, pas de bruit chez mes voisins non plus. Je pourrai être le dernier Homme sur terre, cela ne serait pas diffèrent.

L’interphone sonne. Je descends, on ne s’entend pas bien. Une dame cherche des appartements à acheter. Je lui réponds que je ne suis pas au courant de telles transactions. Je remonte rejoindre ma solitude. Je suis tenté d’aller m’installer dans mon canapé puis au final, je décide de me mettre devant mon pc. Encore un autre écran.

Je me sens mal. J’ai envie de voir du monde mais mon agoraphobie m’empêche de prendre le bus pour aller à l’association de patients, par exemple.

Je ne sais plus quoi faire. Mon corps est comme engourdi et mon cerveau n’est plus capable de se concentrer sur rien. C’est un vrai cauchemar. Je n’arrive plus à taper sur un clavier ni écrire une phrase cohérente.

Il reste encore de nombreuses heures avant que je ne puisse aller me réfugier dans le sommeil.

Ennuyeuse après-midi

Ennuyeuse
Ennuyeuse

L’après-midi se passe de manière longue et ennuyeuse. Je suis chez moi, devant la télévision qui crache des images multicolores pour attirer les téléspectateurs. Je change souvent de chaine, à la recherche de programmes intéressants… Rien n’y fait cet après-midi. Je me décide à éteindre cet écran pour passer à autre chose. Mon appartement est alors plongé dans un calme suspect. Seul, le ronronnement du réfrigérateur me teint compagnie.

Je suis pourtant sorti ce matin, à l’association de patients. J’ai discuté avec les uns et les autres. Il y avait Fred qui était là. C’est chez lui que j’avais passé la soirée du nouvel an. Ça avait été une soirée forte agréable. Fred est un ami de longue date qui souffre de schizophrénie comme moi. Il est de taille moyenne et 10 ans plus âgé que moi. Il a un visage sympathique, assez rond. Souvent souriant, dénotant un côté sociable développé.

Il y avait aussi Thierry, dans un autre style, avec son chapeau de cow-boy, son manteau descendant jusqu’à ses chevilles et son collier clouté autour du cou, recouvert par de longs cheveux noirs. Thierry est un homme original. Il a plus ou moins essayé toutes les substances hallucinogènes. Ce qui lui a laissé quelques séquelles intellectuelles. Il est pourtant aussi très joyeux et pas du tout ennuyeux.

Malgré tout, cet après-midi est ennuyeuse, comme le ciel, sans soleil, complétement gris et sans aucune variation de couleur.

Mais ce matin, j’ai réussi à prendre le bus pour aller à l’association de patients. J’en ai été assez fier. Moi qui ai du mal à sortir. L’intérieur du bus un peu crasseux était assez calme. Les scolaires étaient déjà à l’école et il y régnait une ambiance populaire, avec ces jeunes mamans et leurs poussettes, ou ces passagers qui pas seulement à cause des mouvements brusques du bus n’arrivaient plus trop à tenir debout.

Un dynamisme inattendu

Dynamisme
Dynamisme

La matinée est déjà terminée. Elle s’est plutôt bien passée. Je ressens un dynamisme que je n’avais pas connu depuis longtemps. L’envie de me lancer dans des projets est forte. Je me suis pourtant réveillé à cause d’un cauchemar. C’est tous les matins depuis deux mois. J’ouvre brutalement les yeux, en sueur et angoissé. Il me faut une bonne heure pour retrouver ma sérénité. Voir partir mon père et ma mère en chine pour trois semaines au mois d’avril en est la cause. Bien que je vive dans mon propre appartement, je ne suis pas complétement autonome. Ce n’est pas un problème de course, ni de préparation du repas, ni même de ménage… mais je n’ai quasiment pas d’amis et mes parents sont ma seule compagnie. Les savoir si loin m’angoisse. Je pense à toutes les situations qui pourraient m’arriver et je suis anxieux à l’idée de n’avoir personne sur qui compter. Passer ces trois semaines presque seul est aussi une grande source d’inquiétude.

Avant-hier pourtant, J’ai passé la soirée du nouvel an entre amis, avec d’anciennes connaissances que j’ai réactivées il y a peu. Nous avons mangé et discuté en petit comité, dans un appartement. C’était un moment agréable. Nous étions cinq et la soirée s’est passé sans excès.  Vers une heure du matin, l’on m’a raccompagné chez moi. Cela faisait plusieurs années que je n’avais rien fait. Que j’étais resté seul dans mon appartement en me couchant à neuf heures, après avoir bu une demi-bouteille de champagne.

J’espère sans trop y croire garder ce dynamisme qui m’anime. Je sais que cela ne va pas durer mais je me sens normal et cela me du bien. Même si ce n’est que pour quelques heures, j’aime ce soleil qui me réchauffe le dos et cette impression de ne pas être cabossé, fracturé. Je n’ai pas non plus la sensation que mon cerveau est dans un étau.

Nouvelle année

année
Année

Nous sommes le 31 décembre 2015 et j’ai une soirée de prévu, avec des amis qui ont la même particularité psychique que moi. C’est à 20 heures et j’espère être assez en forme jusque-là pour fêter la nouvelle année. Cela fait plusieurs années que je passe la saint Silvestre seul, dans mon appartement à entendre les voisins faire la fête et les feux d’artifices pétarader… Pour l’instant tout va bien, je suis motiver pour sortir ce soir. J’espère que mon entrain va durer et que je ne vais pas faire faut bon à mes amis au dernier moment. Je ne sais jamais trop comment ma santé évolue.

Hier, l’après-midi fut assez dur. La visite de ma psychologue à domicile ne m’a pas fait du bien. Lors de sa visite précédente je n’étais vraiment pas en forme et tout est remonté à la surface. L’étau dans ma tête et la souffrance psychique m’ont contraint à me mettre dans mon lit vers 19h00. Je n’en pouvais plus.

Heureusement, ce matin je me sens bien. J’ai même discuté avec un ancien professeur d’anglais, que j’avais eu au lycée et que j’ai retrouvé à la boulangerie du quartier. Lors de ces années, pas les meilleurs pour lui m’a-t-il confié, j’étais un élève assez studieux. Il était dans un lycée difficile et pas toujours apte à se faire respecter avec les autres classes. Aujourd’hui, cet homme souriant et débonnaire est à la retraite.

A cette heure, le soleil brille et cela me fait un peu oublier la journée d’hier. Une nouvelle année va bientôt commencer. Je souhaite de tous mes vœux que la recherche en santé mentale comprendra mieux les maladies psychiques, pour toutes les personnes qui souffrent dans leur âme et dans leur chair. C’est un domaine de la médecine qui est trop souvent mis de côté.

Conséquence des neuroleptiques ?

neuroleptiques
Neuroleptiques

Le ciel est gris. Il pleut un peu. Après avoir pris mon traitement à 7 heures précise, je me suis installé devant la télévision. Petit à petit, j’ai senti le Tercian faire son effet. C’est un des neuroleptiques à effet sédatif. Autant dire qu’il ne faut pas se lancer dans un marathon après son absorption. La fatigue est trop intense. Je prends aussi d’autres neuroleptiques qui ne sont pas sédatifs. C’est un sacré cocktail que j’avale trois fois par jour. Les anxiolytiques, les neuroleptiques sont autant de molécules qui ont un impact sur mon cerveau.  A long terme, je ne sais pas quelles en seront les conséquences.

Ce matin, je suis allé faire quelques courses dans le supermarché pas loin de chez moi. C’est un peu le seul moment de la journée ou je vois un peu de monde. Le reste du temps, quand je ne suis pas à l’association de patients, Je suis chez moi ou chez mes parents. Autant dire que j’ai une vie sociale assez limitée.

Aujourd’hui mes parents ne sont pas là et l’association est fermée. Je vais encore passer la journée sans voir personne. Le matin, cela ne me pose pas trop de problèmes, mais l’après-midi, c’est bien souvent interminable. Je m’installe dans mon lit lorsque je souffre trop, pour y passer une demi-heure, puis je déambule dans mon petit appartement. Quand je me sens mal, j’ai l’impression qu’un étau compresse mon cerveau. Je ne peux alors plus me concentrer sur rien. Ni télévision, ni livre, ni écrire ne sont alors possible. Je ne supporte plus non plus la présence d’autres personnes.

Le ciel ne s’est pas dégagé et il fait toujours gris. Je peux voir de ma porte fenêtre, un monde qui me fait un peu moins peur que d’habitude. C’est par période que ma pathologie est la plus dure à vivre, comme une monté de fièvre qui peut durer des moins.

Implacable solitude

Implacable
Implacable

La solitude est là, implacable. Elle s’insinue tel un serpent, sans faire de bruit, jusqu’au jour où il ne reste plus que vos parents comme contacts sur qui compter. Justement ce midi, je n’ai pas été mangé chez eux. Je n’ai pas eu de boule au ventre, pas de remord. C’était une petite victoire. J’ai acheté un sandwich dans la zone commerciale pas loin de chez moi. Je veux prendre un peu de distance vis-à-vis de mes parents et trouver d’autres personnes sur qui compter. Il n’y en n’a malheureusement pas beaucoup. Mes parents font énormément pour moi et je voudrais me débrouiller sans eux. Mais il n’est pas facile de jeter le bébé avec l’eau du bain. Je suis terriblement d’épandant.

En effet, ma solitude est le résultat d’un repli sur soi de plus d’une dizaine d’années. C’est un symptôme implacable de ma pathologie. J’ai bien quelques amis mais que je ne les supporte que peu de temps dans mon appartement ou même à l’extérieur.

Pour vous éclairer sur ma situation, le soir quand il fait nuit, je n’ose plus répondre à l’interphone quand il sonne. Je me suis complètement bunkerisé dans mon appartement.  L’après-midi, je n’ose plus prendre le bus pour aller en ville et j’ose à peine sortir de chez moi. Parfois de violentes angoisses viennent mettre en question, tous les plans que je me suis fixé. Je ne peux vivre qu’au jour le jour en fonction de mon état psychique.

Aujourd’hui nous sommes le 24 décembre et ma famille doit arriver chez mes parents assez tard le soir. Je vais devoir lutter contre une fatigue implacable qui me gagnera rapidement. Mon père sera comme à son habitude charismatique, et à côté, je me sentirai mal à l’aise, victime d’une compétition inconsciente. L’ambiance qu’au fond je ne veux pas, sera lourde entre lui et moi.