J’ai changé de psychiatre il y a quelques mois et je viens de récupérer mon dossier médical. Ce n’est jamais agréable de se replonger dans le passé, en consultant les lettres des médecins, relatives aux diverses hospitalisations. On peut y lire tout un charabia technique.
Avant cela le matin, j’avais repris le bus. Je n’ai pas aimé le bruit des uns et des autres à l’intérieur. Je suis vite contrarié. J’aime le silence et quand tout est calme. Malgré tout je n’ai pas eu d’angoisses. Une adhérente de l’association dans laquelle je vais, était juste à côté de moi. Elle ne m’a pas vu. J’ai un petit doute. C’est une femme d’une trentaine d’années, avec des jambes interminables. Elle est généralement vêtue de manière assez vieillotte. C’est toujours une aventure, quand on veut communiquer avec elle. Elle n’est pas très bavarde et de sa bouche ne sortent que très peu de mots, assez secs. Je ne pense pas qu’elle ait connu des hospitalisations en milieu psychiatrique.
A l’association, ils sont rares les adhérents qui n’ont pas connu d’hospitalisations en milieu psychiatrique.
Sur une lettre de mon dossier médical, j’ai pu lire que je voulais rationnaliser les épisodes délirants. Il m’a fallu des années pour accepter que se fût mon cerveau qui me jouait un mauvais tour. C’est tout un cheminement pour accepter la maladie. Au début, c’est vrai, je voulais expliquer mes délires pour qu’ils aient un sens. C’est moins traumatisant et cela fait moins peur que de ce dire qu’il n’y a pas d’explications, que c’est juste le cerveau qui dysfonctionne.
Sur une lettre, pour une des autres hospitalisations, il était inscrit « tentative de suicide ». Cela fait froid dans le dos. Je n’étais pas délirant, mais juste en trop grande souffrance, pour faire l’effort de continuer à vivre.
Il y a encore quelques années, je n’aurai pas eu la force de me plonger dans cette littérature.