A l’association de patients ce matin, je me suis senti en décalage avec certains adhérents. Il y a Pierre d’abord, qui est arrivé avec le visage couvert de sueur et une veste qui n’avait pas été lavée depuis de trop nombreux mois. Je lui ai serré la main du bout des doigts.
En décalage aussi avec Gérard. Un homme de soixante ans, souvent en train de râler contre sa tutelle, qui ne lui donne pas assez d’argent, mais pas que… Ça fait partie de son personnage de pester, sur tout et rien. Il a fait de la prison, je ne sais trop pourquoi. Il n’est malgré tout pas méchant. Il y a une semaine, il s’est retrouvé aux urgences pour être tombé sur le visage. Ce matin, il avait encore le visage couvert de bleus et du sang sur le pull, qu’il n’avait pas lavé. A l’association, les adhérents lui reprochent son manque d’hygiène. Il a des ongles de plusieurs centimètres, noirs de crasse. Quand il prend un sucre en morceau dans la boite, plus personne ne veut se servir.
Heureusement, il y a Charlotte, j’espère la voir un après-midi de la semaine. J’aime discuter avec elle. J’ai envie découvrir qui se cache derrière cette trentenaire, qui n’a beaucoup parlé d’elle. Elle ne vient pas très régulièrement.
Je me sens aussi en décalage avec les amis que j’avais quand je n’étais pas en souffrance. Ils ont presque tous une femme et des enfants, et ont quitté le quartier qui était notre terrain de jeux.
Quand je refais le film d’une partie de ma vie, des diverses évènements qui l’ont jalonné, je me sens aussi en décalage. Je comprends mieux pourquoi certains « amis » étaient distants avec moi. Il faut dire que je peux être étrange, quand je tiens certains propos. J’ai beau faire des efforts, je suis comme ça.
Je suis une sorte d’ovni, avec de nombreuses angoisses, pas capable de travailler et ne trouvant nulle part ma place.
On ne peut (et ne doit) changer pour personne. Les gens nous prennent (ou pas) comme nous sommes. Ceux qui ne pigent pas n’ont qu’à tracer leur chemin. Ils ne savent pas ce qu’il perdent., les gens « décalés » sont souvent aussi les plus sensibles, les plus imaginatifs et créatifs. On n’est jamais en décalage que par une « norme », tu sais. Il faut apprendre à se créer sa propre norme. À regarder autour et y voir ceux qui rentrent dans ta norme à toi. Ça me semble être un bon programme, non? Créons une norme décalée:-)
Bises
Ayant un fort trouble de l’humeur (et tout ce qui va avec) ça me donne du courage de lire ce genre d’histoire.
Je me sens mieux depuis que j’ai accepté d’être ce que je suis et de suivre à la lettre mon traitement
Félicitation,
Tu as la bonne attitude.
Continue comme ça.