La pluie tombe de manière discontinue depuis un bon moment. Je suis dans mon appartement, bien à l’abri, seul comme toujours. Je commence à apprivoiser cette solitude. Les silences ne sont perturbés que par le son de la radio. Je souffre de phobie sociale. Aller vers les autres est une angoisse à chaque fois. Ce matin, je me sens entier et presque heureux. C’est assez étrange. La schizophrénie m’a aussi appris que la souffrance pouvait survenir à chaque instant, à cause d’une contrariété, d’un stress… de manière disproportionnée, m’obligeant à me réfugier dans mon lit des heures entières.
Dans ma tête, les idées envahissantes sont un vrai enfer. Toute la journée, elles peuvent tambouriner, boum boum boum, cognant encore et encore. Dans ces moments-là, j’essaie de distraire mon esprit, en regardant la télévision. Ça ne marche pas vraiment.
Le repli sur soi, la solitude est mon quotidien.
Par la fenêtre, je vois que la pluie a cessée. Je vais peut-être pouvoir sortir quelques minutes, histoires de voir si j’y arrive encore.
Par la fenêtre encore, je viens de voir passer une bien belle voiture. C’est tout ce monde qui tourne autour de moi et auquel je n’ai pas accès. A l’intérieur il y avait un couple et leurs deux enfants. C’est toute cette vie qui me fait envie et que je n’aurai jamais.
Quand je me m’observe dans mon miroir le matin, je vois quelqu’un de fracturé. Quelqu’un qui ne sait pas trop où il va. Alors, je détourne le regard, pour ne pas avoir à affronter cette terrible angoisse.
Quand je marche dans lotissement, je me demande toujours si les voisins à qui je dis bonjour, savent que je suis schizophrène. S’ils connaissent ce terrible secret. Ils doivent bien se rendre compte que je suis atypique, sans travail, seul, toujours à pied. Pourtant, je suis toujours souriant, comme si de rien n’était.