Je ne me sens plus concerné par grand-chose. Comme si j’étais loin de tout. Le temps pluvieux accentue ce sentiment. Ce matin en me levant de bonne heure, vers sept heures, j’étais en souffrance. Je suis concerné par ma souffrance mais c’est à peu près tout. Je n’arrive plus à m’intéresser à autre chose. Ma souffrance m’obsède. Les gens dans la rue sont comme des ombres qui traversent le temps à côté de moi. Je ne les regarde plus et je ne veux pas avoir d’interactions avec eux. Si quelqu’un s’approche de moi pour me demander la route, j’ai d’abord envie de fuir.
A l’association de patients, je ne me sens pas plus concerné par la vie des gens. Leurs histoires sont une longue litanie que j’écoute un peu pour être poli. Assez rapidement, j’ai envie de passer à autre chose. D’ailleurs je n’y suis pas resté très longtemps.
Dans le bus pour le retour, je regarde par la fenêtre ou sur mon smartphone pour ne pas avoir à croiser le regard des autres voyageurs. Je ne veux pas m’impliquer.
Chez moi, la télévision bourdonne tranquillement. Je suis autant concerné par les images que par les gens en chair et en os. Autant dire que je ne suis pas réellement dans le même monde que vous.
L’après-midi risque d’être longue. Tourner en rond dans mon petit appartement, en attendant que les heures passent, sans autres perspectives.
Mon frigo est vide est je n’ai pas la force d’aller acheter de quoi manger. Je n’ai d’ailleurs pas trop d’appétit.
Il est l’heure que j’avale ma ration journalière de pilules. Elles sont presque toutes blanches. Certaines ont un gout horrible et j’évite de les mettre en contact avec ma langue. Je les avale par paquets de quatre avec un grand verre d’eau. Je plonge alors dans une grande fatigue.