Sourire et dire que tout va bien, juste pour ne pas parler de ses problèmes. C’est souvent ce que je fais. Même quand je suis mal, je dis « oui oui ça va ».
De toute façon, mon mal être est trop compliqué à expliquer. Avant d’être schizophrène, je ne pouvais pas imaginer le genre de souffrance que cette maladie pouvait provoquer.
De plus, je ne me rends pas compte que je suis décalé. Je suis normal, pour moi. Apparemment j’arrive à assez bien jouer le jeu puisque les gens, pas mes proches, mais les autres ne se rendent compte de rien. La vie est un grand carnaval. On se cache derrière une personnalité, que l’on a en partie héritée de nos parents et que l’on a mis des années à construire. On peut alors monter sur scène et sortir nos répliques. Trouver des réponses quand on se moque de nous… Puis on peut rire tous ensembles, alors que nous ne sommes des nains assis sur les épaules d’un géants.
Je me sens assez « nul », même si j’ai toujours une bonne réplique. Bien cassante, pour animer le débat et faire rire quand on me provoque.
Ce matin, à l’association de patients, nous avons bien rigolés. Jacques, habillé d’une veste imitation peau de léopard, cheveux longs et gant scintillant comme Mickael Jackson, a fait le cirque comme à son habitude. Malgré tout je ne me suis moqué pas de son apparence. Il a un côté touchant et on ne tire pas sur une ambulance.
J’ai juste un peu taquiné Isabelle. Elle sait se défendre, c’est pour cela que j’aime bien parler avec elle.
Je crois qu’elle m’apprécie aussi. J’essaie de ne pas être méchant non plus. Parfois, on entend de drôle de chose, comme Daniel, qui sait se téléporter. Je l’écoute un peu en cachant mon envie de rire. Je ne veux pas le blesser.