Journée de repos. Je ne suis pas sorti de chez moi, à part pour aller faire quelques courses. Il me faut toujours un sacrée motivation, même pour acheter de quoi manger. Je me regarde dans la glace, sur toutes les coutures, pour savoir par exemple s’il ne me reste pas du dentifrice sur le coin la bouche, avant de mettre un pied dehors. Je me sens déjà observé en temps normal.
A l’association de patients, ils se sont inquiétés de ne pas me voir pendant deux jours. J’ai été obligé de les rassurer. Cela fait six ans que j’y vais tous les jours. J’avais besoin d’un break. Je ne supportais plus de voir leurs têtes. Et puis je commençais à avoir des crises d’angoisses.
Mettre un pied dehors est toujours difficile. Dans la rue je ne me sens pas dans mon élément. Je n’aime pas croiser le regard des autres. Je ne sais jamais trop comment réagir, je me sens agressé. Je ne supporte pas le jugement des autres.
En discutant avec ma psychologue à domicile hier, nous sommes arrivés à la conclusion que je n’étais peut être pas prêt pour mener une vie sociale normale, travailler même à mi-temps…
Chez moi, je me sens en sécurité. Le moment que je préfère est le soir, quand le soleil est au crépuscule. Je relâche la pression.
A force de ne pas mettre un pied dehors, je vois les années qui passent et ma vie qui file, sans rien construire.
J’esquive toutes les joies de la vie. En même temps, je pourrais être dans un hôpital psychiatrique. Je n’y ai passé tout au plus, que deux mois dans toute ma vie.
J’ai 36 ans et je suis usé le matin lorsque je me réveil, toujours ces mêmes ruminations, sur l’inutilité de ma vie. Je suis pathétique.