L’ennuie gagne du terrain. Ce matin comme très souvent, à 6h00 j’étais déjà debout. Je compte alors les minutes pour arriver à 9h00 et prendre le bus pour aller dans une association de patients. De retours à midi et après un repas en famille, commence la traversée du désert jusqu’à la nuit tombée. Rivé devant la télévision, je m’abrutie d’images en tout genre. Du clip vidéo d’une américaine qui montre ses fesses au débat entre deux hommes politiques.
Quelque fois, il m’arrive de rester crispé pendant de longues heures. Je donne alors de violents coups de poings dans mon canapé. Aucun relaxant ne peut me calmer et viennent parfois les idées délirantes. Je ne suis alors plus bon à rien et vers 18h00, n’en pouvant plus, je vais me coucher. Dans le noir et dans mon lit, j’arrive à trouver un confort psychique.
J’essaie quand même de bien présenter avec des vêtements toujours propres… Dans l’association de patients dans laquelle j’ai des responsabilités, il est arrivé que la femme de ménage me demande d’un ton inquiet « vous n’êtes pas malade vous ? ». Pour ne pas trop la perturber je lui ai menti. Et puis de toute façon, flatté, je n’avais pas envie de m’expliquer. Elle avait l’air satisfaite, je n’ai donc pas insisté.
La schizophrénie n’est pas marquée sur le front. On peut faire un peu illusion. Moi c’est les angoisses qui me démasquent. Ça doit faire plusieurs années que je ne me suis pas éloigné de plus de 5 kilomètres de mon appartement. Et puis le repli sur soi, mes amis ne m’invitent plus à leurs soirées, blasés de m’entendre dire que j’ai mal à la tête ou que je suis fatigué….
Quand ils viennent chez moi, je sature au bout d’une heure. Je me sens envahi. Il n’y a que leur départ qui me soulage. Je suis un ermite. Les gens sont un peu étonnés que dès lors je coupe les ponts. Je m’en lasse vite. Passer des soirées à essayer de trouver des sujets de discussion m’est pénible. Pourtant, certains ont l’air d’apprécier. C’est qu’ils parlent beaucoup et moi j’écoute leurs problèmes. J’en ai déjà assez comme ça avec les miens.